Venise 2019 (suite et fin) : il n’y a pas que la Biennale

* Jannis Kounellis à la Fondation Prada

Jannis Kounellis

Jannis Kounellis

S’il est une exposition à ne pas manquer à Venise c’est bien celle-ci. Magnifique exposition de Jannis Kounellis sous la houlette de Germano Celant. Toutes les œuvres sont magistrales, la présentation dans l’espace de la Fondation est remarquable.

Pour illustrer cette note, j’ai choisi cette œuvre constituée de plateaux suspendus sur lesquels reposent de petits tas de café moulu. Les plateaux tremblent sous l’effet de l’air déplacé par les gens qui passent dans l’escalier, un peu de café tombe, une femme vient le balayer.

 

* European Cultural Center – Palazzo Bembo

(près du Pont du Rialto)

Je n’ai pas encore exactement compris ce qu’était cet European Cultural Center, ni l’approche réelle de l’exposition. Mais peu importe, dans cet ensemble disparate deux œuvres marquent.

"Plastic Reef", Federico Uribe, 2019

« Plastic Reef », Federico Uribe, 2019

La première est Plastic Reef de Federico Uribe qui a transformé deux salles du Palais en récif tropical. On a vraiment l’impression d’être en plongée (la photo ne lui fait pas justice), les couleurs sont éclatantes, c’est enchanteur, un peu kitsch peut-être, jusqu’à ce que l’on réalise que ce paysage sous-marin est entièrement réalisé en objets en plastique.

"Plastic Reef", Federico Uribe, 2019

« Plastic Reef », Federico Uribe, 2019

Bien sûr, nous savons tous qu’il y a beaucoup de plastique dans notre quotidien, mais ici, dans cet amas où petit à petit on identifie les objets derrière les animaux ou les plantes qu’ils « dessinent » et « sculptent », monte un sentiment d’étouffement.

Il pleuvait à Venise ce dimanche de mai, la ville était une marée multicolore de ponchos en plastique. J’en avais un aussi …

 

« Yes, we have done it » - Los Alamos – The Manhattan Project de Manfred Bockelmann

« Yes, we have done it » – Los Alamos – The Manhattan Project de Manfred Bockelmann

La seconde œuvre « Yes, we have done it » – Los Alamos – The Manhattan Project de Manfred Bockelmann, dans une pièce aussi sombre que celle d’Uribe est lumineuse, présente des dessins au fusain sur toile découpés de blouses blanches de laboratoire grandeur nature. Dessous, le nom des scientifiques qui ont participé au projet de la mise au point de la bombe atomique. Dans un angle, une brève vidéo d’Oppenheimer relatant leurs réactions après l’explosion de la bombe.

 

* Accademia

Et puis, à Venise, il y a les collections de l’Accademia et ce sentiment de voir les images de son livre d’histoire prendrent vie.

Il y a aussi l’exposition temporaire de dessins de Leonard de Vinci parmi lesquels « L’Homme de Vitruve ». Il est présenté dans une sorte de cabinet devant lequel une ou deux personnes seulement peuvent se tenir. Se forme une légère file d’attente, chacun reste le temps qu’il/elle désire pour voir le dessin. Derrière, on attend patiemment, respectant ce moment d’intimité. Mon esprit ironique ne peut s’empêcher de penser que cela ressemble quand même furieusement à une procession devant une sainte relique. Et mon tour arrive. Je crois bien qu’avant je n’avais jamais « vu » ce dessin. Et après, je n’ai pas été tout à fait sûre de ce que j’avais vu, d’avoir pu « tout » mémoriser, de ce qui s’était réellement passé.

Est-ce la confrontation d’un dessin devenu iconique avec sa matérialité réelle ? Peut-être. Je ne savais pas qu’il était présenté là, ce jour là. J’ai envie de croire que c’est aussi la rencontre inattendue avec la force d’une œuvre.

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