L’installation d’art numérique XXL Au-delà des limites du collectif japonais TeamLab à la Grande Halle de la Villette devrait connaître un vrai succès. Et ce serait justifié.
La maîtrise technique y est époustouflante, l’ambiance enchanteresse, en tout cas paisible, tranchant avec le brouhaha et le remue-ménage extérieurs.
Dans diverses projections murales, dont une gigantesque sur toute la hauteur du bâtiment, et dans trois petites constructions plus encloses, on y croise des papillons, des oiseaux, des fleurs, un monde aquatique, une cascade, des ombres détourées de personnages tout droit sortis d’un antique rouleau japonais, tout un peuple de créatures humaines et non humaines en mouvement qui réagissent à des degrés divers à notre présence. Si l’après-midi de semaine de juin où j’y suis allée le public était un peu clairsemé, il était clairement ravi : outre la réalisation des inévitables selfies et autres vidéos, les gens prenaient le temps de voir les tableaux et projections se dérouler et ils s’étendaient même dans les fleurs artificielles de l’installation comme ils l’auraient fait sur la pelouse voisine du parc de la Villette.
Pourquoi suis-je donc restée sur ma faim ? A demi convaincue ?
Est-ce l’esthétique, toute en joliesse un peu mièvre ? Est-ce l’absence d’aspérité, ou de ces puissantes singularités qui font qu’une œuvre vous emporte ? Est-ce le fait que je n’ai pas trouvé ça particulièrement immersif mais au contraire que l’image m’est toujours apparue dans sa surface, la planéité de la projection (pour ne pas dire la superficialité).
Mon trouble me semble plutôt venir du sentiment d’avoir vu une compilation, brillante certes, mais sans beaucoup d’inventivité si ce n’est sa dimension.
La cascade qui nous contourne quand on se met dessous ? Le projet Fluid Structures 360°de Vincent Houzé dans Capitaine Futur et la Super Nature à la Gaité Lyrique est plus captivant et le jeu avec les bulles d’eau procurent une sensation d’apesanteur réjouissante.
Les papillons qui ont « peur du feu mais aiment les fleurs », les fleurs qui poussent et évoluent selon la place du spectateur font irrésistiblement penser aux œuvres de vie artificielle de Christa Sommerer et Laurent Mignonneau des années 1990.
TeamLab utilise ainsi un vocabulaire de l’art numérique existant, ce qui en soi n’est pas un problème, mais sans apporter un réel regard singulier.
Si on est doté d’enfants ce sera un joli moment pour les occuper mais jusqu’au 14 juillet on préférera néanmoins Capitaine Futur et la Super Nature, plus inventif.
L’exposition réellement pensée, empreinte aussi bien d’intelligence que d’émotion, avec des œuvres de premier plan, à ne manquer sous aucun prétexte est L’Invention de Morel ou la machine à images, jusqu’au 21 juillet, à la Maison de l’Amérique Latine et, oui, elle est gratuite …